Comme l'ont si bien rappelé tour à tour le procureur de la République Xavier Tarabeux, puis le président du tribunal de commerce de Marseille, Bruno Nivière, le 17 janvier dernier, l'audience de rentrée solennelle de cette juridiction reste en particulier l'occasion de dresser le bilan de l'activité écoulée. Mais elle a été aussi marquée tout d'abord par l'installation de 8 nouveaux juges élus et ayant prêté serment en novembre et décembre derniers devant le tribunal de grande instance, dont une seule femme. L'occasion donc de constater également que la parité est loin d'être acquise en la matière, comme le regrettait elle-même, en aparté, une des rares juges au féminin siégeant au tribunal comptant 80 juges consulaires en tout.
Comme le veulent aussi les us et coutumes de la juridiction commerciale, son président a listé au cours de celle-ci 11 données chiffrées et statistiques permettant d'en évaluer l'action et le volume d'affaires ainsi traitées « au nom du peuple français », comme n'a pas manqué de le souligner Bruno Nivière dans son intervention. Ce qu'il faut en retenir, c'est la baisse (de 8,1 %) du nombre des décisions rendues, qui s'établissent, toutes catégories confondues, à 22 374 pour l'année écoulée. Idem pour le nombre d'audiences tenues, en légère baisse de 1771 (en 2017) à 1763. En baisse aussi*, le nombre de jugements en matière de contentieux général (2572, - 26,9 %), et celui des ouvertures de procédures collectives (sauvegardes, redressement et liquidations judiciaires : 963).
De nouveaux outils pour de nouvelles missions
En forte hausse en revanche, les procédures de prévention (entretiens de prévention, mandats ad hoc, conciliations) qui grimpent en 2018 à 416 contre 321 l'année précédente. Autant de chiffres, ainsi que l'a résumé le président Nivière, qui « témoignent d'une activité plutôt en baisse ». Ce dernier est également revenu sur les nouvelles missions de la juridiction commerciale — lutte contre la fraude, le blanchiment, le financement du terrorisme… — et des outils de police économique dont elle dispose pour, en particulier le Fichier des interdits de gérer (FNIG, 8000 mesures d‘interdiction), le nouveau Registre des bénéficiaires effectifs qui a été mis en place, ou encore le plus habituel Registre du commerce et des sociétés (RCS). Ce qui a permis de comptabiliser une hausse de plus de 46 % des formalités auprès de ce dernier, avec 115 981 dépôts contre 79 191 précédemment. 15 000 entreprises ont été par ailleurs relancées pour non dépôt des comptes et 1000 cessations d'activité prononcées, autant qu'en 2017.
Mettant alors en avant l'importance de la prévention des difficultés des entreprises (convocations, mandats et conciliations dans ce sens étant en augmentation), Bruno Nivière a dit tout le mal qu'il pensait du relèvement des seuils de l'audit légal prévu par la loi Pacte, et souhaité une nouvelle fois l'élargissement des compétences de sa juridiction, 3e tribunal de commerce de France pour son activité, à travers la création d'un véritable « tribunal des affaires économiques » afin de pouvoir couvrir « le champ de toutes les activités économiques ».
* Ainsi que le nombre de salariés concernés par les procédures collectives et de prévention (16 127 contre 19 249 en 2017), les jugements susceptibles de recours (4 852 contre 5 088), et les jugements infirmés (30 contre 38).
Les réquisitions du procureur
Comme le veut le rituel judiciaire, les nouveaux juges installés, le procureur de la République a « donné acte de (ses) réquisitions ». Soulignant à plusieurs reprises « toute la détermination du parquet de Marseille et du ministère public », qui intervient au tribunal de commerce au titre des procédures collectives et de la prévention, mais rappelant tout autant que « l'œuvre de justice reste une entreprise collective », Xavier Tarabeux a mis principalement en avant la baisse du nombre de défaillances d'entreprises avec 206 audiences de procédures collectives contre 221 en 2017, et l'ouverture de 972 nouvelles procédures (contre 1174 en 2017) dont 9 procédures de sauvegarde (14 précédemment), 343 redressements judiciaires (contre 586) et 620 liquidations (contre 638). A noter que parmi ces dossiers traités l'an dernier, l'un, concernant le groupe hôtelier Maranatha, est l'un des plus significatifs recensés au niveau national, avec près de 500 emplois en jeu, lequel est « en passe de trouver une issue favorable, loin d'être acquise », ainsi que l'a précisé, entre autres, le procureur.