AccueilDroit et ChiffreLa prévention, encore et toujours en ligne de mire
Tribunal de commerce d’Aix-en-Provence

La prévention, encore et toujours en ligne de mire

Prévention, modernisation, réduction des délais... Après une activité soutenue en 2022, le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence s’est fixé plusieurs objectifs le président veut atteindre avec les juges, les magistrats, les avocats et le greffe.
Eric Arcamone (au centre), président du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence, entouré des juges consulaires, des greffiers et du procureur, Emmanuel Merlin.
M. Debette - Eric Arcamone (au centre), président du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence, entouré des juges consulaires, des greffiers et du procureur, Emmanuel Merlin.

Droit et Chiffre Publié le ,

Plutôt que de faire un point détaillé des chiffres de l’année écoulée, Eric Arcamone, président du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence, a choisi de mettre en avant les points les plus significatifs lors de la rentrée solennelle de la juridiction. Comme la prévention-détection, qui a fait ses preuves et permet d’éviter que ça aille plus mal. Pour répondre à la demande, le nombre de juges dédiés à la prévention a d’ailleurs sensiblement augmenté.

« Nous avons convoqué 319 entreprises à des entretiens confidentiels. Ils ont débouché sur l’ouverture de 24 mandats ad hoc et de 55 conciliations. Nous avons pu traiter les dossiers bien en amont, ce qui a permis d’éviter les redressements qui sont quelquefois inéluctables. Nous avons révisé et modernisé la procédure pour que ça aille plus vite », a indiqué le président.

Deux conventions ont été signées, l’une avec les services de l’Urssaf et l’autre avec la Direction générale des finances publiques (DGFIP), afin que ces deux structures fournissent des informations affinées.


Autre point abordé, la mise en place d’une procédure d’injonction pour non-dépôt des comptes, avec 1 200 ordonnances rendues car « bien que ce soit une obligation légale, de nombreuses entreprises s’en dispensaient », déplore Eric Arcamone. A contrario, au rayon des satisfactions, il note une diminution du stock : « En 2022, nous avons rendu 738 jugements pour 618 affaires nouvelles. Ce qui veut dire que nous avons commencé à épuiser le stock qui, malgré les visioconférences et autres subterfuges, s’était accumulé durant la période covid. »

Simplifier et améliorer les délais

Une nouvelle convention a été signée avec le barreau d’Aix-en-Provence, en septembre 2022. Il s’agit d’une révision des procédures contentieuses devant le tribunal de commerce, avec la création d’une chambre de mise en état qui permet de formaliser les circuits, en fonction du montant de la demande et de la complexité du dossier, par la mise en place d’un calendrier.

« Notre but est de simplifier et d’améliorer les délais pour le justiciable. Car ce qui est surtout reproché à la justice, c’est le temps long pour rendre des décisions. Il est vrai, si on se place de l’autre côté de la barrière, que pour une créance de 5 000 ou 10 000 € qui peut mettre en jeu la survie de son entreprise, attendre un an ou deux pour être fixé, ça peut paraître un peu long, reconnaît le président. Nous nous sommes fixé comme objectif, avec le barreau, de traiter les affaires dites normales dans l’année qui suit leur enrôlement. Pour les affaires de moindre importance, inférieures ou égales à 10 000 €, de les traiter dans un délai ambitieux de quatre mois. »

Se tournant vers le bâtonnier, il a demandé que « les avocats incitent leurs clients à privilégier, autant que faire se peut, les procédures amiables plutôt que de se lancer dans un procès dont on ne connaît pas le délai ».

Le Guichet unique, « deux ans que ça ne marche pas ! »

« Deux ans qu’on en parle, deux ans que ça ne marche pas ! », constate Eric Arcamone, évoquant le sujet délicat du Guichet unique qui ne permet pas aux déclarants de s’adresser directement au greffe. « Certains sont venus me voir pour me dire qu’ils venaient d’acheter ou de louer un local : "Je comptais démarrer mon activité début février, je paye le loyer et je ne travaille pas." Ce Guichet unique paralyse l’activité économique. Sans Kbis, vous ne pouvez pas travailler », a indiqué le président.


Au niveau du greffe, l’impact direct est une chute de 70 % de l’activité. C’est la première fois qu’un greffe de tribunal de commerce envisage la mise en chômage partiel des collaborateurs. « De temps en temps, il faut savoir dire qu’on s’est trompé. Finalement, la seule chose que j’ai vu fonctionner du premier coup, c’est le prélèvement à la source des impôts », s’est amusé Eric Arcamone.

Comme il est de coutume, le président du tribunal de commerce a donné la parole au bâtonnier, Benoît Porteu de la Morandière. (Crédit : M. Debette)

Vigilance et prévention

Lors de ses réquisitions, Emmanuel Merlin, procureur du tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence, a mis en avant « l’importance du rôle des juridictions commerciales qui vient d’être encore confortée dans le cadre des Etats généraux de la justice ».

Concernant l’économie, il a souligné « les perspectives concernant notre économie et la vie des entreprises paraissent particulièrement sombres. Nous sortons d’une période dramatique marquée par la pandémie qui, si elle n’a pas généré l’effondrement économique qui pouvait être craint en matière de procédures collectives, ne le doit principalement qu’à une situation en trompe-l’œil, ayant permis le maintien de notre économie grâce aux nombreuses mesures d’aides mises en place. Des mesures nécessaires, mais maintenant qu’elles arrivent à leur terme et qu’il faut notamment rembourser les PGE [Prêts garantis par l’Etat, NDLR], la réelle fragilité de nombre d’entreprises se révèle au grand jour. »


Il a pointé « l’ubérisation de l’économie marquée par le développement d’un très (trop ?) grand nombre de micro-entreprises, bien trop fragiles pour résister aux aléas d’une période troublée ». Période troublée à laquelle s’ajoutent de « nouvelles tensions du fait d’une nouvelle crise, celle des matières premières et des prix de l’énergie […] qui va impacter de plein fouet un tissu économique fragilisé qui n’a pas eu le temps de reprendre son souffle ». D’où l’intérêt d’être « vigilant avec un accent encore plus marqué sur la prévention des difficultés, le sauvetage d’une entreprise étant infiniment plus efficace lorsque les difficultés sont décelées le plus en amont possible ».

Le mot du bâtonnier

Depuis quelques années, il est coutume de donner la parole au bâtonnier. Un exercice auquel Benoît Porteu de la Morandière s’est volontiers prêté : « Mesdames et messieurs les juges consulaires, nous avons le plus profond respect pour votre engagement judiciaire. Engagement d’autant plus digne et respectable que vous l’accomplissez de manière totalement désintéressée. […] Vous êtes, à mon sens, la quintessence de la juridiction de proximité. Celle d’une justice qui a su conserver et concilier l’humanité et la proximité. […] Nous avons choisi de créer, au sein de notre barreau, une commission qui vous est exclusivement réservée et qui a travaillé cette année avec le greffe et la juridiction pour faire évoluer la procédure contentieuse devant le tribunal de commerce. »

Bernard Mangin, juge installé durant l’audience, en compagnie d’Eric Arcamone, président du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence. (Crédit : M. Debette)

Un nouveau juge installé

Bernard Mangin a été installé dans ses fonctions de juge au sein du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence. Après 40 années au sein de Schneider Electric, leader mondial de la distribution électrique, il a déjà acquis une expérience des juridictions consulaires au tribunal de commerce de Paris, dont il a été juge de 2018 à 2021.

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« Votre statut de juge consulaire vous confère des pouvoirs importants : apaiser les conflits et trancher les litiges, dire le droit, prévenir et gérer les défaillances d’entreprises, préserver les intérêts des créanciers et des salariés, sanctionner également, parfois, les gestions par trop hasardeuses, lui a rappelé le procureur, Emmanuel Merlin. Ces nouveaux pouvoirs emportent de nouvelles obligations et vous devrez, dans le cadre de vos nouvelles responsabilités, respecter constamment des devoirs d’indépendance, d’impartialité et de neutralité, tandis que les principes déontologiques devront vous guider dans l’exercice de vos fonctions. »

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