Les Nouvelles Publications : Quel regard portez-vous sur la cour d'appel d'Aix-en-Provence ?
Marie-Suzanne Le Quéau : C'est une région que je ne connais pas. Dès février, je vais commencer les visites dans les juridictions. Néanmoins, le procureur de Marseille, notamment, a déjà attiré mon attention sur la situation du tribunal judiciaire et en particulier sur la chaîne pénale qui présente des difficultés de fonctionnement. Il faudra que j'en analyse les causes, avec les chefs de juridiction, pour y remédier.
Quelles sont vos priorités ?
Un procureur général a deux casquettes. Il est à la fois un chef de cour chargé de la bonne administration des juridictions de son ressort et il a une mission centrale qui est la déclinaison régionale de la politique pénale définie par le gouvernement et énoncée par le garde des Sceaux. A Aix-en-Provence, les quatre priorités principales sont la lutte contre la radicalisation et le terrorisme, contre les violences conjugales, contre la délinquance économique et financière, et enfin la lutte contre la criminalité organisée traitée par la juridiction inter-régionale spécialisée (JIRS) de Marseille.
En dehors de ces priorités, il y a un sujet qui me tient personnellement à cœur, c'est la lutte contre les atteintes à l'environnement, notamment tout ce qui a trait à l'urbanisme.
D'autres sujets qui vous tiennent à cœur ?
Deux autres priorités me sont imposées par l'actualité législative. A savoir, l'entrée en vigueur en mars de la loi « bloc-peine » du 23 mars 2019. Les objectifs sont de développer les aménagements de peine à l'audience et les alternatives à l'incarcération. C'est un très gros chantier.
Le deuxième, pour lequel nous devons déjà nous préparer, concerne l'entrée en vigueur du code de la justice pénale des mineurs le 1er octobre prochain.
Votre feuille de route est bien chargée !
D'autant que je souhaite m'atteler à deux autres sujets. Le premier étant le formatage des organisations. Je suis convaincue que toutes les organisations ne se valent pas et que nous devons réfléchir à un modèle théorique d'organisation des services qui serait adapté en fonction des particularités locales. J'ai déjà abordé ce travail dans mon précédent poste. En partant, par exemple, de l'étude de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, j'ai examiné les orientations procédurales, comment était déclinée la politique pénale et comment étaient organisés les services. L'objectif étant de mettre en œuvre cette orientation procédurale. Ça permet de dégager le modèle le plus efficient, le plus efficace.
Et le second ?
La Chancellerie travaille à ce que nous ayons une procédure pénale totalement dématérialisée, de la prise de plainte au jugement des affaires. C'est un projet extrêmement ambitieux qui correspond à une volonté du président de la République. C'est un changement de culture auquel il faut se préparer. Pour cela, j'entends réfléchir à la fois au sein de la Cour d'appel et avec les procureurs à une accélération de ce processus pour que, le moment voulu, nous puissions sans difficulté passer à cette procédure pénale numérique.