Depuis la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006, les entreprises ont la possibilité, lorsqu'elles sont d'ores et déjà couvertes par un accord d'intéressement, de compléter ce dispositif d'un intéressement de projet.
L'article L. 3312-6 du Code du travail permet ainsi aux entreprises ou aux groupes disposant d'un accord d'intéressement et « concourant avec d'autres entreprises à une activité caractérisée et coordonnée », de mettre en place un intéressement de projet au profit de leurs salariés.
Par cet outil, le législateur entendait réunir, autour d'un projet commun, les salariés d'entreprises différentes participant à la construction d'un ouvrage, à un projet technologique ou industriel, ou encore des salariés appartenant à des filiales d'un groupe de sociétés, afin d'encourager au partage de la valeur entre employeurs et salariés et de motiver les salariés impliqués sur un projet, à atteindre des performances communes.
Si l'intention du texte était louable, le champ d'application de l'intéressement de projet demeurait toutefois très restreint, celui-ci ne s'adressant qu'aux entreprises impliquées avec d'autres, dans la réalisation d'un projet commun, tel qu'un projet industriel ou de construction d'ouvrages.
En conséquence, il n'était donc que très peu recouru à l'intéressement de projet, dès lors qu'une entreprise ne pouvait envisager sa mise en place sur la base d'un projet dont elle était la seule actrice. A titre d'exemple, le viaduc de Millau peut être cité comme l'une des rares illustrations de la mise en œuvre de l'intéressement de projet, entre les entreprises partenaires ayant participé à sa construction.
Aussi, afin de lever ce frein et d'inciter les entreprises à faire usage de cet outil, assurément vecteur de motivation pour les salariés, la loi n° 2019-486 relative à la croissance et la transformation des entreprises du 22 mai 2019, dite loi Pacte*, s'est donnée pour objectif de relancer l'intéressement de projet, en élargissant son périmètre d'application.
Complétant l'article L. 3312-6 du Code du travail, la loi Pacte ouvre ainsi la faculté à une entreprise seule, disposant d'un accord d'intéressement, de mettre en place une formule d'intéressement de projet, en « définissant un objectif commun à tout ou partie des salariés de l'entreprise ».
Un régime social de faveur
Bien que l'existence d'un accord d'intéressement « classique » reste un préalable nécessaire, un projet interne à l'entreprise peut désormais justifier la mise en place d'un intéressement de projet, à destination de tout ou partie de ses salariés.
L'intéressement de projet n'est donc plus exclusivement limité à la réalisation d'un projet commun à plusieurs entreprises, mais pourra porter sur la mise en œuvre d'un projet interne, tel que la refonte du système informatique, la conception d'une automobile ou encore le développement d'une nouvelle technologie.
Autre nouveauté majeure, le bénéfice de cette prime d'intéressement complémentaire peut ne concerner qu'une partie seulement des salariés de l'entreprise. L'idée est simple : motiver les salariés participant au projet en leur versant une prime, en sus des sommes perçues en application de l'accord d'intéressement classique, qui devra la prévoir expressément.
Gardons toutefois à l'esprit que les sommes attribuées au titre de l'intéressement de projet se cumulent aux primes issues de l'intéressement classique, pour apprécier l'atteinte ou non des plafonds prévus par l'article L. 3314-8 du Code du travail :
- le montant global de ces sommes ne doit pas excéder 20 % du total des salaires et des rémunérations versées annuellement aux bénéficiaires ;
- et, au plan individuel, le montant cumulé des primes d'intéressement est dorénavant plafonné aux trois quarts du plafond annuel de la Sécurité sociale (soit 30 852 euros pour l'année 2020).
En revanche, la prime d'intéressement dédiée au projet bénéficie, par extension, d'un régime social de faveur. Les sommes attribuées sont en effet, sous condition de respecter les conditions légales, exonérées du forfait social pour les entreprises employant moins de 250 salariés et sont exclues de l'assiette des cotisations de Sécurité sociale, ce qui devrait encourager davantage les entreprises à se tourner vers cette nouvelle formule.
L'intéressement de projet ouvre donc de nouvelles perspectives. On pense notamment à la fixation d'objectifs pluriannuels liés à un projet de cession future des titres d'une société et au partage entre salariés et actionnaires d'une fraction de la plus-value résultant de la cession.