En 2021, le Museon Arlaten d'Arles a attiré 56 000 visiteurs, quasiment le double de sa fréquentation avant qu’il ne ferme en 2009 pour des raisons de sécurité, puis une longue période d’études et de travaux qui ont conduit à sa transformation. Mais aux yeux de ceux qui ont parcouru autrefois ce lieu sombre, vétuste et surchargé, ce musée a subi plus qu’une réhabilitation : une véritable réinvention, imaginée par l’agence d’architecture Tetrarc de Michel Bertreux. Le Conseil départemental des Bouches-du-Rhône a investi 22,5 millions d’euros dans un chantier qui a duré trois ans et s’est prolongé par la création d’une scénographie époustouflante pour valoriser 3 600 objets d’une collection qui en compte 40 000 ! Mais il n’a jamais pu l’inaugurer, principalement en raison des restrictions sanitaires successives.
Le musée se dévoile donc à ses partenaires par petites touches, comme ce 11 mai. La conseillère départementale en charge de la langue et de la culture provençale, Mandy Graillon, ex-reine d’Arles, et Aurélie Samson, directrice et conservatrice en chef du patrimoine du musée, accueillaient les représentants de la Fondation Crédit agricole Alpes Provence qui a apporté 100 000 euros pour le déploiement des technologies de médiation numérique. « La préservation du patrimoine et la transmission du savoir constituent des éléments forts de notre fondation à laquelle le Crédit agricole Alpes Provence consacre chaque année 1 % de son résultat, explique Catherine Tissandier, sa présidente et vice-présidente du conseil d’administration de la banque coopérative régionale. Frédéric Mistral, fondateur de ce musée, est un personnage central de la culture provençale. Si l’on veut que les plus jeunes et les moins jeunes se retrouvent dans ce lieu, il faut des tablettes, des écrans tactiles, des documents en 3D pour mettre en avant ses trésors et les rendre attractifs pour tous. »
Une visibilité accrue en France et à l’international pour le Museon Arlaten d'Arles
Tout au long du parcours, des dispositifs spécifiques ont aussi été installés pour les publics en situation de handicap (non-voyants, malentendants…). Mandy Graillon souligne tous les efforts accomplis pour que ce site ne soit jamais vu comme désuet. « L’objectif est de montrer la modernité de cette tradition, combien cette culture provençale reste vivante… Les reines d’Arles peuvent porter leur costume d’arlésienne avec fierté, elles n’en ont pas moins leur portable dans la poche. Mistral voulait recueillir les objets du quotidien, le musée continue d’enrichir régulièrement ses collections. »
Aurélie Samson rappelle que le statut de "musée de France", obtenu en 2002, impose un projet scientifique et culturel approuvé par le ministère de la Culture. Chaque nouvelle intégration dans le fonds muséal relève donc d’un processus de recherche ou de sélection scrupuleux. « Nous recevons beaucoup de dons de particuliers, admet-elle. La richesse de notre collection nous permet de répondre souvent à des sollicitations de musées français et étrangers pour des prêts. Nous avons ainsi contribué à l’exposition "Dioramas" au Palais de Tokyo, à Paris, en 2017. »
Indispensable complément du site, un Centre d’étude, de restauration et de conservation des oeuvres du Museon Arlaten (CERCO) a été créé en 2013 sur le parc des Ateliers, à Arles, sous la houlette des architectes Anne Lévy et Nicolas Magnan.
Démystifier l’image du musée
Dès que le visiteur pénètre dans les salles du musée, il est "happé" par ce dialogue constant entre la Provence d’hier et celle d’aujourd’hui. Des reproductions de statues antiques côtoient de grands écrans où défilent des images actuelles du territoire, fêtes populaires et matches de l’OM. « Ce voyage dans le temps renvoie systématiquement au présent, poursuit la directrice. Les dioramas font beaucoup réagir car ils peuvent révéler des traditions méconnues par les Provençaux eux-mêmes. »
« Nombre de nos concitoyens hésitent à entrer dans un musée. Il y a ici des objets qui parlent à chacun, à son métier, à ce qu’il a vu ou partagé dans sa famille ou sa commune. Une fois "accroché" par cet intérêt très personnel, il se sent partout chez lui, décomplexé », ajoute Cyril Brunet, chargé de relations publiques.
Parmi les découvertes les plus étonnantes, au cœur de l’édifice, l’escalier suspendu, à l’allure légère malgré ses plusieurs tonnes de verre et de métal, entouré de décorations conçues par le couturier Christian Lacroix (photo ci-contre). Ou encore la chapelle, son retable et son maître-autel qui ont survécu (au prix de quelques rénovations) aux siècles.
Le Museon Arlaten d'Arles ouvrira jusqu’à minuit pour la nuit des musées, ce 14 mai. Avec une exposition temporaire consacrée au mariage.