LNP : Vous êtes élu aux côtés de Patrick de Carolis (Horizons) depuis deux ans, qui avait la volonté de reprendre en main l’économie. Comment avez-vous procédé dans la mesure où Arles compte plusieurs zones d’activités identifiées ?
Jean-Michel Jalabert : Nous avons fait en sorte d’enclencher ce qui pouvait l’être. Au nord de la Zone industrielle Nord, la zone du Fer à cheval était prête à démarrer sur une superficie de quatre hectares où nous pouvions aménager sept parcelles en vue de leur mise en vente. Leur prix n’avait jamais été fixé. Nous avons lancé les travaux début 2022 pour 800 000 € d’investissement et le premier acte authentique a été signé en avril. Les permis sont en cours de dépôt ou d’instruction. Elle correspond aux besoins de TPE/PME artisanales et industrielles. Une deuxième phase sera lancée ultérieurement sur deux hectares, lorsque le Plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) aura été révisé, à la suite de l’achèvement des réfections de la digue entre Arles et Tarascon par le Symadrem[Syndicat mixte interrégional d’aménagement des digues du delta du Rhône et de la mer, NDLR].
Il nous est difficile de densifier la ZI Nord existante. Une étude d’optimisation foncière avait identifié un potentiel de 13 hectares, mais ce sont des parcelles privées, très dispersées et non utilisées par leurs propriétaires. Nous n’avons pas la main dessus. La discussion peut être menée avec ceux qui voudraient les céder, mais nous ne pouvons pas être moteurs sur le sujet.
Par ailleurs, nous avons rencontré les responsables de toutes les associations de zones, Cap Fourchon [98 entreprises, 128 M€ de chiffre d’affaires, 1 300 emplois, NDLR], sur la zone commercial de Fourchon, et au nord, Ecopôle Arles Nord, plus mixée entre commerces, services, industrie, artisanat, afin de recueillir leurs attentes d’amélioration. Mais le foncier reste rare sur les deux. La zone de Montmajour, pourtant la plus récente, est déjà quasiment complète…
Qu’en est-il de la zone portuaire où la Compagnie nationale du Rhône (CNR) semble vouloir attirer des projets en lien avec le port fluvial géré par la CCI du Pays d’Arles ?
Avec Electrosteel, spécialiste des canalisations en fonte ductile, nous avons vu courant avril les potentialités du port fluvial pour le report modal de livraisons de conteneurs sur des barges plutôt que de mobiliser des camions sur les routes. Pour les parcelles disponibles, la CNR avait lancé un appel à projets et deux dossiers se précisent. D’abord, QCP 2 (LyondellBasell/Suez) dans le retraitement de matières plastiques. Le permis est en cours d’instruction, avec un investissement de 60 M€ et une cinquantaine d’emplois pour une des usines les plus performantes en Europe, complémentaire de celle en service aux Pays-Bas. C’est un projet 100 % mené sous notre mandature. Nous avons été en concurrence avec 12 sites, puis quatre, et Arles a été choisie. L’autre projet est celui d’Electrosteel pour une unité industrielle, avec 250 emplois supplémentaires. Nous espérons fortement qu’Arles sera sélectionnée mais rien n’est encore signé.
De telles implantations correspondent à la logique que nous voulons promouvoir : les personnes qui vont y travailler apporteront des ressources supplémentaires sur la commune, y résideront, y consommeront… Ces recettes pourront être réinvesties dans d’autres développements.

Deux autres zones ont été évoquées pour le futur d’Arles, les Minimes et le site des ex-Papèteries Etienne (fermées en 2014), propriété de la communauté d'agglomération depuis 2018. Comment avez-vous avancé sur ces sujets ?
Nous continuons de travailler sur leur devenir car nous ne voulons pas nous tromper, vu la rareté du foncier accessible. L’une, les Minimes, devrait être réservée à un projet de campus, avec des structures de formation susceptibles d’attirer encore des étudiants, si possible en adéquation avec des projets en lien avec le territoire. Arles en compte 1 200 aujourd’hui. Nous voulons doubler ce nombre sur la mandature.
Quant aux Papèteries, une partie est occupée par le stockage d’équipements des Rencontres internationales de la photographie, par la compagnie de théâtre de rue Ilotopie et par le Pôle Culture et patrimoins, leur destination future n’est pas déterminée.
Arles a souvent tenté de se positionner sur le numérique, certaines ambitions ont avorté pour diverses raisons par le passé. Que portez-vous dans ce domaine aujourd’hui ?
Nous avons créé en 2021 une association et un label Arles Créative, avec la volonté de rassembler très largement acteurs publics et privés. Arles est la capitale de l’image fixe, nous voulons en faire aussi la capitale de l’image animée. Nous souhaitons nous diriger sur la production de contenus, de l’animation 3D, de la réalité virtuelle, de l’impression 3D… dans les industries culturelles et créatives, mais pas seulement car ces technologies contribuent à transformer une multitude de secteurs, par exemple dans la médecine, avec des prothèses fabriquées en impression 3D ou en appui d’opérations chirurgicales.
La société d’animation « Tu Nous Za Pas Vus Productions » est en plein essor… Nous réfléchissons à des solutions pour son projet d’extension, une proposition devrait être formulée dans le courant du printemps. D’autres entreprises importantes seraient prêtes à nous suivre sur ces secteurs. L’idée serait de créer de nouvelles filières de formation aux côtés de Mopa[Motion Pictures in Arles, NDLR] et de l'IUT.

Côté infrastructures, un calendrier pour le contournement autoroutier se dessine, mais des oppositions se ravivent parallèlement. Comment abordez-vous ce dossier ?
Nous y sommes favorables. Le dossier avance, on peut toujours remettre en cause ses impacts, mais il n’est plus possible de tolérer les risques générés par la voie existante. Le week-end de la Feria, un camion s’est renversé et le bouchon remontait jusqu’à Nîmes (Gard). Il a même fallu retarder le début d’une corrida pour laisser aux automobilistes le temps d’arriver… Et chaque été, avec la fréquentation touristique, la question n’est pas de savoir s’il va y avoir un accident, mais à quelle heure il va avoir lieu. Cet axe est également source de nuisances pour les riverains avec la concentration du trafic…
La Ville, la communauté d’agglomération, la CCI… militent pour la réalisation du contournement. L’Etat a enclenché le processus. Il nous le promet pour 2028. Ensuite, nous pourrons réfléchir à sa requalification en boulevard urbain et réintégrer enfin cette saignée dans le développement de la ville.
Le Département lancé une consultation sur un pont à Barcarin au lieu du bac. Vous êtes pour cet ouvrage ou vous redoutez qu’il ne menace la Camargue ?
On peut très bien avoir un pont et mettre en œuvre des dispositifs qui empêcheront le massacre de la Camargue. Il faut l’interdire aux poids lourds et le réserver à la desserte locale, en offrant une porte d’entrée à Salin-de-Giraud [2 000 habitants, NDLR], mais pas pour transiter à travers la Camargue.
Les habitants n’y sont plus opposés car au moindre problème, il leur faut 45 minutes pour rejoindre Saint-Martin-de-Crau ou Fos. Prévoir un péage empêchera l’accès des véhicules qu’on ne voudra pas. Ce pont changera la vie des Saliniers. On espère son existence pour la fin de la décennie.