Cour d'appel d'Aix-en-Provence : 210 avocats rejoignent le ressort

Les 210 nouveaux avocats du ressort ont prêté serment dans la salle des pas perdus de la cour d'appel d'Aix-en-Provence. Cette année, la cérémonie a eu lieu en l’absence de leurs proches, visages masqués et espacés de leurs confrères en raison des mesures sanitaires. Ce qui, heureusement, ne changeait en rien l’aspect solennel de cette audience. Comme l’a confirmé Me Jean-Pierre Rayne, président de l’Ecole des avocats Sud-Est : « J’aime la solennité de cette audience de prestation de serment parce qu’elle vous place au plus près des fondamentaux, l’essence et le cadre de votre future mission qui est de concourir à l’œuvre de justice. »

Il a listé quelques-unes des « facettes magiques » de ce métier qui fait d’eux, aux côtés des magistrats, les gardiens du respect des libertés et droits fondamentaux : « Vous ne vous lasserez jamais de l’échange et du partage, de la découverte de la complexité de l’autre, de la joie d’apporter de l’apaisement, parfois du bonheur, de la satisfaction de trouver des solutions, de les inventer, du plaisir de voir sécher des larmes, de restaurer des dignités, de faire renaître des sourires. »

La robe, un symbole d’appartenance

Me Jean-Pierre Rayne a insisté sur l’importance du respect des règles éthiques, sévères et astreignantes qui sont une force, sur l’importance de ne jamais transiger avec les principes déontologiques, notamment ceux du serment, être irréprochable pour être toujours respecté. « Nous sommes les seuls, par cette droiture choisie, à pouvoir porter la parole des autres. »

Cette cérémonie de prestation de serment marque aussi le début d’une nouvelle vie que le président de l’Edase a qualifiée de vocation, d’engagement majuscule au sens le plus noble, celui du don de soi avec des « affrontements qui seront rudes, parfois violents. Vous ne sortirez pas indemnes de certains parce que, en vous interposant, vous épouserez aussi la misère, le désespoir, la souffrance et, parfois, le malheur des autres. Le poids du secret constituera certains soirs un bien lourd fardeau. »

La robe a tenu une place importante dans le message adressé par Me Benoît Porteu de la Morandière, bâtonnier d’Aix-en-Provence, à ses nouveaux confrères : « Cette robe, elle vous oblige autant qu’elle vous autorise. Portez-la respectueusement, mais portez-la fièrement ! Vous l’avez tous méritée, alors levez la tête et veillez à ne jamais l’oublier. » L’épitoge témoigne du respect dû au monde judiciaire et de l’indépendance qui doit guider la carrière des avocats. « Vous la portez pour la première fois. A l’avenir, elle vous protégera. Tant que vous la porterez, elle vous distinguera. Elle sera parfois le témoin de vos désarrois, mais plus encore de vos réussites, et même souvent de vos joies », a poursuivi le bâtonnier.

Servir l’idéal de justice

Rappelant qu’elle a« une haute considération pour le métier qui est le vôtre, complémentaire de celui de magistrat, mais soudés par la volonté de servir l’idéal de justice », la procureure générale Marie-Suzanne Le Quéau a insisté sur leur changement de robe : « Vous serez désormais des auxiliaires de justice, pas les auxiliaires des juges et des substituts, mais les auxiliaires de cette mission d’intérêt général que vous ne devez jamais perdre de vue au travers des intérêts particuliers que vous aurez à connaître. »

Rentrée de la cour d’appel d’Aix-en-Provence : c’est aussi la crise de l’institution judiciaire

La procureure générale a indiqué que les jeunes avocats intégraient le barreau dans un contexte évolutif. En raison des contraintes sanitaires qui rendent les conditions de travail quotidien plus aléatoires, du nombre important d’avocats, de la complexification croissante du droit « qui signe sans doute la fin de l’avocat généraliste, cédant la place à l’avocat spécialiste ».

Enfin, elle a cité une déontologie encore plus exigeante puisque, le 1^er juillet, de nouvelles règles vont modifier les pratiques habituelles, « votre profession va être invitée à écrire un code de déontologie pour donner un contenu aux termes de votre serment et définir […] les obligations éthiques et déontologiques qui participent à votre identité professionnelle », a poursuivi Marie-Suzanne Le Quéau, précisant que « ces obligations déontologiques trouveront à s’appliquer pleinement dans la relation magistrats-avocats pour ceux et celles d’entre vous qui feront du palais de justice leur seconde maison ».

Plus qu’une simple formalité

Pour Renaud Le Breton de Vannoise, qui a recueilli le serment, « il ne s’agit pas d’une simple formalité substantielle. Il s’agit d’une promesse dont vous ne pourrez plus vous dédire tout au long de votre vie professionnelle. Une promesse dont les termes doivent être gravés à jamais dans votre mémoire. Vous vous engagez irrévocablement à défendre les valeurs que ce serment induit », a rappelé le premier président de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

Il leur a prodigué quelques conseils de magistrat, leur rappelant qu’ils sont eux aussi tenu par une déontologie exigeante - « Il serait fécond que l’on puisse régulièrement porter un regard croisé sur nos obligations à cet égard » -, et a insisté sur le fait que « ne pas occuper la même place dans le prétoire ne nous divise pas, mais nous rappelle que notre concours, magistrats et avocats, est indispensable à l’œuvre de justice. Il ne peut y avoir d’avocat sans juge et de juge sans avocat. »

Martine Debette

Photos M.Debette