S’il est encore trop tôt pour faire le point de la saison touristique 2021 à Aix-en-Provence, force est de constater qu’elle n’a pas trop mal démarré. Le mois de mai n’a pas vraiment été catastrophique et les hôteliers ont affiché un taux de remplissage de 45% (au lieu de 70% à cette période). Quant au mois de juin, il a été plutôt satisfaisant.
Contrairement à certaines destinations telles que Nice, Marseille ou encore Avignon, les hôteliers aixois n’ont pas cherché à brader les prix. En effet, Aix-en-Provence a bénéficié d’une bonne dynamique avec la présence d’une clientèle française, principalement des couples, séjournant durant deux à cinq jours, dépensant cependant moins que la clientèle internationale habituelle. « C’est une des évolutions de la demande en raison de la crise. Toutefois, il faut que nous travaillions ce secteur qui pourrait permettre de compléter la basse ou la moyenne saison des hôteliers », explique Jean-Philippe Alfonsi, responsable Promotion internationale loisirs et Développement de filières de l’office de tourisme d’Aix-en-Provence. Autre point positif, le retour des clientèles européennes (Belges, Allemands, Italiens, Suisses) se fait sentir.
La clientèle internationale toujours ciblée
Quelle serait la priorité pour faire revenir la clientèle internationale ?
« Ce serait l’extension vers un pass sanitaire international. Nul doute que les compagnies aériennes, qui ont déjà perdu beaucoup d’argent, vont mettre le paquet pour demander des garanties a minima et que les destinations, les institutionnels et les privés, qui vont accueillir ces clients en déplacement, devront garantir une base sanitaire sécuritaire. C’est une action collective. Ceux qui pourront tirer leur épingle du jeu sont ceux qui offriront des garanties les plus intéressantes », répond Jean-Philippe Alfonsi.
Reste cependant le problème de la reconnaissance des vaccins entre les États et l’harmonisation du QR code du pass sanitaire. Ce qui conduit à des situations parfois ubuesques. « Un professionnel brésilien m’expliquait qu’un tourisme sanitaire se développe. Actuellement, des Brésiliens aisés n’hésitent pas à se rendre aux États-Unis pour se faire injecter un vaccin reconnu au niveau mondial pour pouvoir voyager. C’est un business de tourisme vaccinal qui concerne une clientèle haut de gamme qu’on retrouve le plus souvent sur les longs courriers », note Jean-Philippe Alfonsi. Une bonne chose pour Aix-en-Provence puisque la ville est la première destination de Paca plébiscitée par les Brésiliens. Une clientèle très haut de gamme historique, à laquelle s'ajoute une nouvelle, plus familiale, qui pèse dans l’économie (achats, excursions, produits à l’office du tourisme d’Aix-en-Provence, etc.) avec un panier moyen plus important que celui des autres touristes étrangers.
Travailler les marchés
A l’international, tous les marchés ne fonctionnent pas de la même façon, on s’en doute. Mieux vaut s’adapter aux pratiques de chacun d’eux, ce qui peut parfois ressembler à un casse-tête. « Notre appréhension et notre connaissance des marchés, avec l’aide d’Atout France, nous permettent d’adapter la manière dont nous les travaillons. Par exemple, en ciblant les grosses agences aux USA, ou en prenant en compte qu’il y a deux marchés au Canada (Québécois et anglophone). En Chine, on sait qu’il ne sert à rien de pratiquer le BtoB aveugle, il faut passer par le BtoC ou par les OTA [agences de voyages en ligne, NDLR] comme Ctrip pour être visible, etc. », indique Jean-Philippe Alfonsi.
Aix-en-Provence est une ville universitaire qui accueille de nombreux étudiants, français et étrangers. Des étudiants qui incitent leurs familles à séjourner dans la cité du Roi René. Un tissu important qui représente jusqu’à 26% de la clientèle étrangère (en 2019). Un manque à gagner très préjudiciable en période de crise sanitaire.
Autre marché suivi de près, « celui de la génération millénium, des jeunes CSP+ qui sont éduqués, voyagent de façon autonome, passent seuls par des OTA, parlent anglais, louent des véhicules et circulent sur le territoire. Ils ne passent pas forcément par de l’intermédiation, complexe à décrypter. C’est d’ailleurs ce qui a été mis en avant lors de la campagne du Comité régional du tourisme "Provence enjoyed the unexpected" qui regroupe 100% de l’offre de la région Paca permettant de faciliter l’accès à l’information pour le client », rappelle Jean-Philippe Alfonsi.
Préserver l’économie et l’environnement
« Alors que nous allons vers une dégradation inéluctable de nos sites préservés, nous allons aussi vers une prise de conscience des nouvelles générations qui accordent de l’importance à l’environnement et la façon de consommer un territoire. Il faut que nous soyons force de proposition et que nous ayons les bons messages pour attirer cette cible de jeunes CSP+, qui se débrouille, qui a la culture du voyage. En tant qu’acteur économique du tourisme, notre rôle n’est pas uniquement de faire venir des gens, de faire entrer des devises et de remplir les hôtels. Le développement touristique doit intégrer la notion environnementale pour sauvegarder nos paysages, notre territoire. »
Jean-Pierre Alfonsi observe : « La clientèle évolue. Elle veut rencontrer des chefs, des artisans, des viticulteurs, etc. reconnus et ayant une histoire à raconter. Elle veut acheter sur les lieux de production. Cela correspond à une évolution de l’offre qu’il faut adapter à cette clientèle en demande. Depuis deux ans, les Hollandais reviennent dans le secteur de l’hôtellerie, alors qu’ils n’y venaient plus depuis un certain temps. La clientèle est plus jeune, orientée sur la gastronomie et le vin, la nature, la découverte, le vélo, et la culture. Des composantes touristiques hétérogènes », soulignant la chance qu’à Aix-en-Provence de pouvoir proposer une offre alliant la culture traditionnelle, ancrée, avec un fort patrimoine, et la pleine nature, le rural. Une tendance accélérée avec la crise sanitaire que Jean-Philippe Alfonsi constate également par les demandes de journalistes, friands de reportages dans ce sens. Aujourd’hui, son rêve est de « réenclencher rapidement les flux à l’international et reprendre un petit peu du monde d’avant ».